Photo/journaliste
DAMAS, LA GUERRE EN ROSE
Syrie -juin 2018
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Syria , June 2018 . While the war that broke out following the popular demonstrations of 2011 continues in some areas of the country, the Syrian capital seems to gradually regain a semblance of normality. The streets are crowded as the end of Ramadan celebrations begin, children play in parks and smoke emanates from the foggy cafes.
Il était à peu près 5h du matin lorsque j'ai quitté Damas en direction de Tartus, territoire contrôle par le régime et situé sur la côte. Dans le mini bus, nous sommes à peu après une vingtaine à participer à ce road trip de 24 h en ce vendredi de congé. Chapeaux et lunettes de soleil sont de circonstances. Quelques minutes après avoir démarré, le soleil se lève sur un paysage de désolation. À la sortie de Damas, les immeubles sont ravagés, il ne reste que du noir, des brûlures et des blessures. J'ai le regard humide et happé par l'extérieur lorsque le bruit me sort de ma tristesse. Nadia, 13 ans, a branché le baffle, l'a relié à son téléphone et ils se sont mis à danser. Certains, assis à l'arrière, se sont levés pour venir sur la "scène" avant. Nous traversons la province d'Homs, dont la capitale est considérée comme un bastion anti-régime et qui fut bombardée, assiégée et dévastée. Sur ce paysage de mort se superposent des classiques de la musique arabe, des chansons à la gloire de Bachar et des sons électro. Durant les 5 heures de trajet arrêtées par une vingtaine de check points, plusieurs se succéderont au micro normalement réservé au chauffeur pour y chanter. Si ma première pensée fut " comment peuvent-ils faire ça ?", j'ai vite compris qu'ils n'avaient pas vraiment le choix et que je n'étais personne pour juger, il y avait dans ce contraste beaucoup de choses, mais pas d'indécence. C'était la première fois que je voyais la guerre et c'était bien au chaud derrière une vitre. Pour la plupart d'entre eux, cela faisait 7 ans qu'elle envahissait leur vie. C'était la première fois depuis des années qu'ils pouvaient voyager presque normalement dans leur propre pays, pas étonnant qu'ils célèbrent cette lueur d'espoir, ce petit mieux, aussi imparfait soit-il. C'est donc aussi cela le drame de la guerre, on s'habitue à l'horreur et l'on respire les poumons grand ouverts chaque bouffée d'air, aussi polluée soit-elle.